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snap, crack, pop...(less about meaning than being)
Richard Kerr, Staggered Loops, image de vidéo, 2012
À propos Avec ce projet pour les vitrines de la Galerie FOFA, Richard Kerr, cinéaste expérimental et membre du corps professoral de l’Université Concordia, présente plusieurs œuvres représentatives de sa série motion picture weavings (« tissages cinématographiques »), ainsi qu’un nouveau corpus de projections accompagnées d’objets picturaux. Cette itération matérielle de la technique de la spinning camera (« caméra tournoyante ») créée par Kerr pour présenter des travaux profondément formels et à effet hypnotisant évoque les rotoreliefs de Marcel Duchamp et les premières machines modernistes comme les métamécaniques de Jean Tinguely. Les œuvres allient également avec brio les intentions fort différentes de ces deux artistes : « l’art pour l’esprit » de Duchamp et la proposition de Tinguely, au sein du Nouveau Réalisme, de « nouvelles manières de percevoir le réel », les projections rotatives et les objets peints étant apparemment les mêmes images arrêtées. Lorsque présentées avec les motion picture weavings, ces œuvres se manifestent comme des réalités construites dont l’artiste est le complice. L’exposition et la conversation offriront l’occasion d’analyser la trajectoire singulière et constante de la production de Kerr, décrite par Brett Kashmere – cinéaste, commissaire et auteur établi à Pittsburgh – comme un mélange d’intensité-énergie esthétique et d’observation-retenue patiente qui donne lieu à une fusion des styles abstrait et documentaire.
Démarche artistique Ma démarche est un verbe. Observer, fabriquer, apprendre et enseigner sont des actes quotidiens. Je suis motivé par les processus de l’intuition, de la spontanéité et du flux de conscience. Curieux, je pose des questions sur les matériaux, la technologie et l’esthétique. Pour répondre à mes interrogations et satisfaire ma curiosité, je reviens toujours à la pratique quotidienne et j’observe, je fabrique, j’apprends, j’enseigne… - Richard Kerr
Biographie Richard Kerr est un artiste visuel et un créateur d’œuvres numériques reconnu pour sa production abondante. Depuis les années 1970, il a abordé une multitude de genres et de techniques, et a créé plus de 30 films et vidéos qui ont été vus et achetés partout dans le monde. Dans les années 1990, Richard Kerr a élargi son champ de pratique aux installations « métacinématographiques » et, plus particulièrement, à la conception de son Motion Picture Weaving Project (« projet de tissage cinématographique »). L’enseignement de Richard Kerr – qui est à la fois professeur et artiste – inspire son travail en atelier qui, réciproquement, profite à son enseignement.
Le « wow » esthétique On m’a demandé de réfléchir à l’avenir du septième art puisque j’enseigne le cinéma d’avant-garde et que je me consacre à ce genre depuis toujours. Je travaille auprès d’une génération d’étudiants qui se préoccupent avant tout de savoir « Qu’est-ce que le cinéma? » ou, objets de débats passionnés, « Qu’est-ce que le cinéma n’est pas? » et « Quel est l’avenir du cinéma? ». En fait, ils se posent la question suivante : « Comment vais-je faire pour m’orienter et trouver ma place dans l’avenir? » D’après moi, les interrogations sur l’avenir du septième art sont fastidieuses plutôt que complexes. Pour survivre dans l’univers actuel et futur du cinéma numérique, un praticien doit se fixer des objectifs clairs puisque toute confusion peut lui faire perdre du temps et ébranler ses idées ainsi que sa détermination. Pour ma part, je ne panique pas, car je sais parfaitement ce qu’est le cinéma : c’est un cinéma individuel. Le (mon) cinéma – le cinéma individuel – était résolument axé sur l’avant-garde américaine des années 1960-1970, un genre limitatif s’adressant à une élite, il faut le reconnaître, et qui a fait l’objet de nombreuses analyses. Néanmoins, c’était une époque formidable pour être jeune, naïf et curieux d’un cinéma qui défiait les normes tout en étant rigoureux, et qui avait l’ambition de vouloir occuper « sa » place dans les dialogues élargis de l’art contemporain.
Ce cinéma qui est devenu le (mon) cinéma a ouvert la voie à l’individualité, au questionnement et à la culture personnelle. En ce qui me concerne, le (mon) cinéma avait pour objectif d’atteindre un « wow esthétique », l’expérience marquante de ces projections et visionnements qui modèlent notre regard et notre ouïe, ainsi que nos rapports avec notre avenir dans le cinéma. Les leçons tirées du champ de bataille de l’avant-garde tendent à stimuler nos réflexions sur ce que le cinéma peut ou ne peut pas être. Le (mon) cinéma en réduction et en pureté se traduit par la lumière, le temps et l’espace, soit le rythme, ou le façonnement du temps par l’entremise de projections lumineuses. J’ai réagi à la particularité, à la forme, à la structure et à la poétique de tous les cinémas. Pour ne pas perdre la raison, je dois me préparer avec détermination et lucidité aux exigences du cinéma de demain. Les interrogations anxieuses sur l’avenir du cinéma se sont multipliées avec l’arrivée précipitée de la technologie numérique. C’est seulement après avoir exploré quotidiennement la technologie numérique que sa nouveauté totale – de nouvelles valeurs, une nouvelle esthétique – m’a semblé évidente. J’ai aussi découvert que j’avais intérêt à être clair sur ce qui était acquis et véridique sur le (mon) cinéma, mais que je devais me résoudre à abandonner la « vieille école » pour intégrer « la nouvelle école »… pour TOUJOURS! Une leçon digne de Tom Sherman.
À titre de praticien, j’aborde les questions sur l’avenir du cinéma par un travail intuitif quotidien et un jeu avec les hybrides, les technologies et les matériaux « nouveaux ». On ne sent pas de pression au sujet de l’avenir lorsqu’on est obsédé par le travail qui nous occupe. C’est dans mon rôle de professeur que commence la provocation. En prenant du recul pour observer ces complexités mythiques concernant l’avenir du cinéma, je suis poussé à manifester de l’optimisme et de l’enthousiasme devant la prochaine génération de praticiens. Je dois néanmoins le faire avec une certaine retenue pour ce qui est non pas de l’orientation même de la discipline, mais bien de l’avenir de son créateur. Avec une bonne attitude, une compréhension de l’histoire et une grande détermination, la pratique cinématographique est prometteuse et recèle un potentiel illimité. Si l’on fait abstraction des enjeux soulevés par la technologie, il n’y a rien de neuf ici : le cinéma a toujours été mené par la technologie et l’artiste a toujours pavé la voie. Les problèmes inconnus de l’avenir du cinéma résident non pas dans la technologie comme voie d’accès, mais bien dans les valeurs que la technologie numérique exige et propose. La révolution numérique s’est accompagnée d’une « nouvelle » démocratie de la réalisation et, par conséquent, d’une fragmentation critique et culturelle. La démocratie et la fragmentation ont fait éclater le cadre : toutes les voix sont légitimes, le critique est rentré chez lui, le canon du passé est sécurisant et le praticien peut jouer librement. En cinéma numérique, il n’y a ni hiérarchie ni censeur. Nous sommes plus près du rêve « godardien » de l’absence de propriété intellectuelle. La liberté de créer n’est pas un enjeu. Le vrai problème, c’est ce que le praticien fera de toute cette démocratie numérique et cette liberté de production. L’avenir du cinéma se noiera-t-il dans son propre bruit, le système nous poussera-t-il à entreprendre une révolution vide de sens? En fin de compte, je ne m’inquiète pas de l’avenir du cinéma comme tel, mais plutôt de l’avenir de l’individu qui produira le cinéma de demain. Connaissez votre propre cinéma, croyez-y, et soyez reconnaissant d’avoir un cinéma auquel vous croyez. - Richard Kerr
Depart pour l’Image
a.k.a.
Picture Start
Au début des années 1990, j’ai réalisé mes derniers films en 16mm. J’ étais toujours préoccupé par la rentabilité de ma production, mais en prenant du recul, je me suis rendu compte que j’ avais déjà accompli mes objectifs dans ce domaine, ou du moins je le croyais. Au même moment la vidéo entra dans ma vie. Je suis un enseignant, j’ai du donc en tenir compte. Et je l’ai fait. La vidéo continue à faire partie de ma pratique quotidienne. Juste au moment où je croyais en avoir fini avec la pellicule, un heureux hasard s’ est produit au studio: j’ avais à portée de mains une boîte de chaussures remplie de bandes d’ annonce de films de Hollywood (trouvée dans un ciné-parc en Saskatchewan), une feuille de plexiglas et une fenêtre. L’intuition entraînant la spontanéité et invitant au jeu, quelques minutes plus tard j’avais réalisé un prototype pour un projet de “ Motion Picture Weaving” (“tissage” de pellicules de film). C’était au milieu des années 90 ; depuis j’ai réalisé plus de 50 “design-tissages”. J’ ai accumulé, de nouveau par hasard, des archives considérables de 16mm/35mm qui me servent d’inspirations pour créer mes “ design-tissages”. Je me sens presque obligé d’honorer ce rare et précieux matériel. Chaque œuvre représente pour moi un court métrage. Les jours où j’y travaille je me sens comme un réalisateur de films plus que je ne l’ai jamais ressenti auparavant; toutes ces mesures et ces manipulations de pellicules sur une table lumineuse, cette agréable sensation de composition et de montage. Ce matériel est important pour moi, c’est ce que je comprends vraiment. - Richard Kerr
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Œuvres sélectionées
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